Notre héritage familial transgénérationnel recèle des pistes pour trouver notre mission de vie.
Bonjour à tous,
Quelle joie de vous retrouver par cette newsletter, petit rendez-vous trimestriel comme un fil d’Ariane pour redonner l’impulsion de se tourner consciemment vers l’essentiel : À quoi je sers ?
Ai-je avancé ce trimestre-ci vers un mieux m’aimer moi-même ?
Comment puis-je accéder à une paix intérieure pour m’aimer moi et mieux aimer l’autre ?
Comment peu à peu s’approcher de sa vraie nature, de son plein potentiel au service de la vie ?
Autant de questions simples mais compliquées à la fois qui sont le centre de notre évolution !
Mes deux premières newsletters vous parlaient d’approches transgénérationnelles pour trouver des indices d’une mission de vie personnelle.
Se peut-il que notre héritage familial transgénérationnel – toujours bancal – recèle des pistes vers notre rendez-vous essentiel que nous pourrons ensuite appeler mission de vie ?
Pour plusieurs auteurs présentés dans ma dernière newsletter comme K. Jung et D. Dumas, le centre de leur recherche transgénérationnelle met avant tout en lumière un fonctionnement inconscient, le reliant à un héritage familial psychique.
La notion de crypte et de fantôme énoncée par Abraham et Torok contient elle aussi la notion d’inconscient. Celui-ci réclame une prise en considération et se manifeste le plus souvent par une problématique récurrente – ou fantôme inconscient – trace d’une mise sous silence d’événements non gérés, non élaborés et mis sous scellés dans une « crypte psychique » par les générations précédentes. Pour les chercheurs pionniers modernes dans le domaine de l’accompagnement humain comme A. Jodorowsky, A.A. Schutzenberger, B. Hellinger, S. Tisseron et S. Lebovici le vocabulaire peut varier, mais toujours ils soulignent un héritage familial subconscient – véritable kyste psychique – vécu en fardeau ou comme une invitation à un questionnement pour évoluer dans son quotidien ou innover sa vie ! ( pour en savoir plus)
Aujourd’hui, plongeons dans la psychanalyse corporelle et ses huit niveaux de revécu qui donnent accès à notre histoire personnelle (1).
Bernard Montaud dans les années 80 a fondé une nouvelle psychanalyse, par le corps.
Basée sur le principe du lapsus corporel, la psychanalyse corporelle permet à chacun de revivre son passé à travers 8 couches de mémoire physique et psychique.
Ne nous cantonnons pas dans ce contexte de newsletter à la théorie, plongeons dans une étude de cas… Première perception d’une authenticité physique et psychique d’exception, un accès vers une nouvelle vie.
Le cas d’Elise :
Dans les premières séances de psychanalyse corporelle, Elise découvre le premier niveau de lapsus corporel, le spasme sans sens. C’est comme un sursaut qu’elle attend à chaque début de séance, qui lui échappe et se répète. Elle l’accompagne ensuite jusque dans une tension abdominale associée à un effondrement thoracique: c’est l’entrée en confidence du corps dans les premiers mouvements involontaires. Loin de toute perte de conscience, c’est l’expérience du « lâcher-prise ». Cette première étape est souvent ressentie comme une expérience positive. Enfin le corps peut s’exprimer c’est dans ces premiers balbutiements qu’il le fait. Enfin la tête lâche, enfin la personne peut se laisser aller.
Au fur et à mesure des séances, les lapsus deviennent plus profonds, son corps se met à raconter des bribes avec un engagement croissant : ses bras se replient poings serrés. Pendant le temps de verbalisation qui suit la séance, elle décrit des instants pêle-mêle comme des photographies de famille, des courts métrages où elle endure les efforts permanents qu’elle doit faire pour être un enfant modèle pour exister dans cette famille. Ce sont les niveaux trois et quatre de la psychanalyse corporelle. Ici on accède aux couches symboliques de la mémoire psychique.
Dans les deux niveaux suivants, au cours des sessions successives, Elise a maintenant des gestes concrets : elle est sur le dos et joue avec ses mains. Ensuite elle a les jambes repliées, elle pleure pour appeler sa maman. Ses articulations rentrent peu à peu dans des tensions intenses exprimant déjà les douleurs psychiques qu’elle vit. Dans la verbalisation, elle retrouve sa petite enfance – deux mois après sa naissance. Avec de nombreux éléments concrets, l’essuie bleu avec une girafe sur lequel elle est posée après le bain, la présence tendre du papa habillé en pyjama à motifs damassés beiges, son petit lit à barreaux blancs.
Au septième niveau de revécu, Elise a le poignet droit complètement fléchi, dans un conflit articulaire intense. Cet ultime lapsus corporel quasi insoutenable manifeste le conflit psychique qui l’habite.
Après la séance, elle exprime toute la douleur de la situation qu‘elle vient de revivre … Tout avait pourtant commencé dans un moment si tendre!
Ce matin-là c’est son papa qui l’a lavée. C’est un tel bonheur de sentir tout l’amour qui les unit, la tendresse des gestes. Elle a retrouvé tous les élans du petit bébé plein de sensualité.
Quand sa maman arrive, elle la sent fermée, fatiguée. Elle voudrait tant l’amener avec eux dans cette tendresse. Sa maman est prête à la langer et Elise se met à faire pipi. C’est bon de sentir cette chaleur sur son ventre et ses petites cuisses. Mais Elise le sent, sa maman est furieuse devant ce bébé qui fait pipi sur elle avec un plaisir évident. Alors elle frotte ce ventre et ce sexe de plus en plus fort. Elle est devenue folle. Elise sent toute l’histoire de cette maman, aînée de huit enfants, soumise aux travaux d’entretien pour toute la famille, elle qui n’a pas pu faire d’études, ni de musique parce qu’elle était une fille… méprisée par ses frères qui avaient droit à la formation, aux loisirs ! Elle était devenue une femme de devoir assumant la famille et reniant toutes ses envies.
Elise reçoit une terrible leçon dans cette toilette si rude… il lui faudra enlever toute trace de chaleur et de plaisir… elle devra dorénavant tout cacher !
Pendant que sa maman la talque, Elise frôle da déraison: il y a d’un côté, cette sensualité si vivante, mais qui va lui faire perdre sa maman et de l’autre, la femme forte, la femme de devoir :une façade bien rangée pour pouvoir rester dans cette maison! Ces deux mondes ne peuvent pas coexister. Alors dans un choix déchirant, et pour être aimée de cette maman, Elise renonce à sa dimension de petite fille pleine de vie, elle fait le sacrifice de sa féminité. Elle raconte alors avec des larmes si touchantes : «si vous saviez comme elle souffrait cette petite maman, elle était tellement débordée au milieu de tous ces langes à laver, elle avait tellement renoncé au plaisir alors que mon papa était occupé au dehors !»
A ce niveau le plus profond de la psychanalyse corporelle, il n’y a plus ni victime ni bourreau. En effet, ce personnage n’est rien d’autre qu’un gentil papa ou une gentille maman qui a fait tout ce qu’il pouvait, avec lui aussi une histoire ancienne tellement pesante et ses limites d’amour. Et c’est véritablement ce niveau de revécu et de compréhension qui va permettre d’innocenter et de nous réconcilier en profondeur avec tous les personnages-bourreaux que nous reproduisons dans notre quotidien (1).
Enfin, au huitième niveau, pour Elise, c’est une mise en sens de cet événement par rapport à sa propre féminité jugulée qui se présente à elle. A quel point elle a à rejoindre cette féminité pleine et ce plaisir pour ouvrir d’autres pistes pour elle-même et pour les femmes par la même occasion.
Ce premier pas, centré sur une mise en sens de nos comportements, apaise fondamentalement le quotidien. Il est le préalable à un changement fondamental, celui de moins se juger soi, d’innover au quotidien et à sortir de nos engrenages usuels. Alors la joie tranquille habite au plus profond de l’être et donne ce sentiment unique d’être enfin en paix.
Petite confidence, si ce cas me touche c’est que j’y retrouve en partie les élans, la grâce de la petite fille que j’ai un jour été… et vous ?
Est-ce que ce témoignage vous a touché ?
Est-ce qu’il résonne sur une corde sensible d’empathie pour un parent (maman ou papa) débordé ?
Est-ce l’enfant brisé qui vous bouleverse ?
N’hésitez pas à me donner vos impressions par rapport à ce premier contact avec la psychanalyse corporelle…
Dans une prochaine lettre nous mettrons le cap sur l’héritage transgénérationnel depuis le revécu de psychanalyse corporelle. Notre objectif sera de toucher du doigt des éclaireurs sur la route de notre mission de vie.
- B.Montaud, 2018 Laisse parler ton corps, les fondements de la psychanalyse corporelle
- B.Montaud ; C.Berte et al, 2009 Ni bourreau ni victime, les apports de la psychanalyse corporelle.